La maison des paons : L’art de redonner tout leur panache original aux façades du bâtiment

L’ATELIER DE SCULPTURE SUR PIERRE CAL’AS

Parmi les artisans ayant oeuvré sur la maison des paons, Vincent Du Bois, de l’atelier Cal’AS situé au Petit-Lancy, est intervenu sur les sculptures en s’inspirant de la tradition des maîtres anciens lors de la dernière campagne de restauration, qui date de 2011-2012. Il a hérité cette passion de son grand-père maternel, un Cassani d’origine italienne, venu s’installer à Genève pour travailler comme sculpteur sur pierre. Aujourd’hui, son petit-fils allie les méthodes ancestrales et les nouvelles technologies qui lui donnent une ouverture sur le futur.

« EN MATIÈRE DE RESTAURATION, ON ASSISTE A UN DÉBAT ENTRE LA FILIÈRE ACADÉMIQUE ET MANUELLE. J’ESSAIE POUR MON COMPTE DE RÉUNIR CES DEUX COURANT. »

» Une tendance de la restauration est de ne pas intervenir sur la substance historique », souligne-t-il, fort de son expérience et de sa formation à Genève, où il a effectué un apprentissage de sculpteur sur pierre auprès de son grand-père, ainsi qu’à Carrare et à Chicago, où il décrocha un Master of Fine Art à la School of the Art Institut.  » Pour moi, l’important est de considérer la restauration dans sa globalité, à savoir que la substance historique n’est pas le seul ornement en façade, mais bien toute la chaîne de savoir-faire dont il dépend. Je me méfie des tendances intellectualisantes de la restauration actuelle qui ne voient dans l’ornement que la trace historique et minimisent les interventions directes sur la pierre. En la désincarnant du geste qui l’a fait naître, on oublie un savoir-faire ancestral. Par ce biais, c’est en même temps la possibilité de faire vivre dans le long terme cette substance historique que l’on condamne ». Il milite en faveur du respect des rythmes ancestraux qui ont permis à nos pierres de taille de survivre à travers les époques, à savoir, en ravalant, en faisant des empiècements et en retaillaIl partage son quotidien entre son métier d’artisan tailleur de pierre et celui d’artiste contemporain.  » En matière de restauration, on assiste à un débat entre la filière académique et manuelle. J’essaie pour mon compte de réunir ces deux courants. Pour ce qui est de la maison des paons, on a eu la chance e pouvoir se faire entendre « , souligne-t-il. Les formes sont ce qu’elles sont.  » On enlève la croûte qui s’est formée sur la pierre, on refait des encorbellements, on essaie de reconstituer au mieux les parties détériorées « . En matière d’art contemporain, un débat un peu similaire à lieu, l’approche intellectuelle (aussi dite conceptuelle) de l’art se détachant volontiers du savoir-faire.

Selon Vincent Du Bois, le tout est d’arriver à passer de la théorie à la pratique. Il est important de préserver les gens qui possèdent le savoir-faire indispensable pour relever les défis qui permettent d’inscrire l’idée dans le pragmatisme de la matière. Un défi qu’il s’est lancé quand il a créé son propre atelier dans les locaux de son grand-père, car le marché de la sculpture est en pleine évolution :  » Les outils numériques ont donné un nouveau souffle à la sculpture sur pierre « .

IMMOSCOPE . septembre 2019